Un tableau avec un visage d’ange m’a incitée à pousser la porte de l’atelier de peinture de Sandrine. Des oeuvres poétiques et un désir généreux de transmettre ce regard sensible sur le monde : je vous invite à rencontrer une artiste lumineuse à l’occasion de l’exposition Galerie Saint Simon à Versailles, du 13 au 19 novembre 2017.
Pouvez nous nous parler de votre activité de peintre ?
Je travaille à temps plein depuis six ans et cette activité se déploie maintenant dans plusieurs directions : travail de recherche, commandes de peinture et sculpture, expositions, salons et enfin transmission du métier sous forme de stages auprès d’enfants et d’adolescents.
Depuis un an je participe à des salons. Pour cet automne : le Salon des Arts de Pontoise, le salon de l’Ecole Française à Paris à la mairie du 8ème, une biennale à Rambouillet et le Salon National des Beaux Arts en décembre prochain à Paris.
Mon dernier projet s’intitule « Variations autour du chœur ».
L’inspiration autour du chœur d’enfants m’est venue il y a plusieurs années. Je trouve le thème de l’enfance un peu sous-traité dans l’art. Ce qui m’a plu, c’est d’une part ce rapport à la musique et d’autre part de pouvoir traiter ce sujet avec la tradition de la peinture, en l’intégrant dans une démarche contemporaine.
J’ai essayé de déployer ce chant d’enfant dans le temps et dans l’espace sur le tableau, sans cassure, comme une partition musicale. D’ailleurs je travaille en noir et blanc pour reprendre les couleurs des partitions. Il y a aussi un côté graphique qui me plait.
J’ai nommé ces tableaux avec des termes musicaux : Crescendo, Cantabile, A capella, Un poco piano…
Je dessine au fusain et après je mets en lumière certaines scènes avec la Tempera Grasse (technique ancienne de pigments de peinture auxquels on ajoute de l’huile, inventée par Van Eyck). J’essaye de reproduire le côté vivant de la partition, avec des parties très racontées, denses, et d’autres silencieuses, mais d’un silence habité…
J’ai besoin d’avoir du sens, une histoire à raconter. Je dessine d’abord mes portraits, je les peins, et ensuite je vois comment j’organise mon tableau, avec des collages.
J’essaie de montrer des temps différents : un enfant chante, un autre est plus en retrait. J’ai un fond que je texture, et quand l’œil est exercé, des visages apparaissent. J’aime bien aussi intégrer des petites références à l’histoire de l’art dans mon travail, ce qui permet plusieurs niveaux de lecture de l’œuvre, suivant les connaissances du spectateur ; comme par exemple ce petit agneau peint en référence au retable de Van Eyck, où sont représentés des anges musiciens chantant. Mais je ne vais pas tout dévoiler ! Je laisse le lecteur chercher ces indices !
Je travaille aussi avec les images induites : mettre en évidence des formes créées au hasard, c’est Leonard de Vinci qui faisait ça.
Je peins toujours en musique, on pense « grand » en écoutant de la musique, surtout classique !
Je fabrique et je monte mes propres toiles aussi, ça me permet d’avoir quelque chose de grande qualité et c’est une manière de penser déjà à ma peinture en apprivoisant la matière.
Paralèllement à ce travail en monochromie et assez dessiné, j’ai eu besoin d’équilibrer ma démarche avec des créations en couleurs et très peu dessinées, en travaillant sur le paysage. Aussi j’ai travaillé sur le chant de la terre, uniquement avec des encres : je ne voulais pas exprimer la terre « lourde », mais uniquement ce qui s’en dégage, en écho. Je m’inspire des petits bouts de mares, avec des reflets. Un arbre apparait, des étoiles… Je pousse un peu plus loin dans ce que je vois mais sans trop en dire non plus, il faut garder un peu de mystère.
J’ai choisi les encres car c’est très fluide, aérien, sans matière, puis je poursuis à l’huile. J’adore mélanger toutes les techniques : pastel, huile, encre, dessin. J’aime découvrir de nouvelles choses et les associer.
Comment cela a-t-il commencé pour vous ?
J’avais fait de l’aquarelle petite, puis énormément de musique, du piano, et j’ai commencé la sculpture à 18 ans. Ensuite j’ai fait une maîtrise d’histoire de l’art ; parallèlement j’étais guide à Rome et j’adorais ça !
J’ai toujours continué à faire de la sculpture et à jouer beaucoup de musique. J’ai continué à suivre un enseignement en allant aux Beaux Arts en auditeur libre et je donnais quelques conférences d’histoire de l’art. Puis je me suis rendue compte que si je ne peignais pas, au bout de six mois je déprimais ! La pratique musicale me plaisait, mais à la fin de la semaine, ça c’était évaporé, il n’en restait plus rien, j’avais besoin de m’exprimer de manière plus concrète.
Le déclic majeur, le coup de foudre total s’est produit le jour où je suis entrée dans l’atelier d’Hélène Legrand, une femme extraordinaire, à Saint Germain en Laye, il y a six ans.
Hélène m’a dit « si vous voulez devenir peintre, vous le deviendrez, mais ce sera tous les jours de votre vie du matin au soir. » Dès lors j’ai travaillé du matin au soir ! J’ai suivi son enseignement pendant un an, un cheminement très riche car elle transmet toutes les règles de la peinture : la théorie des couleurs, la théorie du nombre d’or avec une vision très philosophique de la peinture qui m’a beaucoup portée.
Je continue à aller la voir régulièrement. Je me considère toujours comme « aspirant peintre » devant la beauté et la grandeur de l’art.
Quelles sont vos références artistiques ?
Tout me fascine !
Je suis très inspirée par les peintres de l’école de Sienne, pour leur radicalité mystique. J’adore Gauguin, Turner, Hopper, Salzmann, un contemporain américain qui fait des aquarelles puissantes et hyper poétiques sur des transferts de photos. J’ai beaucoup aimé l’exposition « Late Turner » vue en Angleterre. Il part dans une abstraction paysagère très contemporaine, c’était magnifique.
Je peux citer encore Zhao Wou-Ki, mort en 2013, d’abord formé à l’école de peinture très académique de Chine et venu en France pour l’art occidental. Il travaille l’abstraction paysagère avec des couleurs somptueuses. Un très grand à mon avis !
Mais ce qui me porte le plus paradoxalement, c’est la lecture car elle me redonne le sens profond de mon travail : deux auteurs surtout dont la pensée sur l’art me nourrit beaucoup et dont je lis et relis les ouvrages : François Cheng avec ses « Cinq méditations sur la beauté », « De l’âme » et Philippe Lejeune, peintre et philosophe, décédé en 2014 et fondateur de l’école d’Etampes qui explique une vision métaphysique de l’acte de peindre dans « Rome, unique objet ».
Vous exposez cette semaine à Versailles. Avez-vous d’autres projets dont vous souhaiteriez nous parler ?
Effectivement il y a cette exposition intitulée « Enchanteur…au chœur du paysage » à la galerie Saint Simon, 10 rue Saint Simon à Versailles, du 13 au 19 novembre prochains.
Ensuite j’expose au Salon National des Beaux-Arts de Paris, du 7 au 10 décembre prochains.
J’aimerais beaucoup participer à la biennale de l’art contemporain à Versailles qui a lieu en Avril 2018 au carré à la Farine.
Je développe aussi un projet pour promouvoir l’éducation à l’art auprès de la jeunesse, avec l’association OVDB (On Veut Du Beau). Cette « éducation intégrale à l’art » prend en compte toutes les dimensions de l’enfant : sa sensibilité, ses émotions et son intelligence aussi avec la transmission de l’histoire de l’art.
C’est un sujet qui me tient très à cœur : comment aider les jeunes hyper-connectés d’aujourd’hui à retrouver le chemin de leur intériorité pour recevoir toute cette beauté ? L’idée est d’essayer de leur donner les clés de leur propre perception du monde par leurs cinq sens, autour de trois modules : la couleur, la forme et la texture. J’ai mis au point une pédagogie pour les écoles et collèges avec des petits exercices artistiques très concrets pour que, quelles que soient leurs références culturelles ou leurs aptitudes, les jeunes puissent s’y retrouver. Sur deux heures, ils ont toujours un pinceau ou un pastel en main, ils manipulent la matière.
Je réfléchis à d’autres modules comme le sens de l’oeuvre. Pour l’instant j’expérimente moi-même en milieu scolaire avec des jeunes.
Etes vous inspirée par Versailles dans votre travail de création ?
Versaillaise depuis peu, je m’y suis tout de suite sentie bien.
Les bâtiments de Versailles sont tellement nobles qu’on est porté par cette grandeur de l’histoire. Quelque part, on a envie d’en être digne.
D’ailleurs, j’ai déjà en tête un projet en rapport avec Versailles ! Je voudrais travailler sur la vie actuelle dans le parc du château : les joggeurs, les familles en promenade peints en couleurs sur des plans des parterres du parc, en écho à l’histoire du lieu. Je vais souvent courir dans le parc, c’est très inspirant. D’ailleurs le thème de cette exposition à la galerie Saint Simon, «enchanteur », je l’ai trouvé en courant dans le parc du château !
Quel sens donnez vous à votre travail ?
La beauté du monde et des hommes me fascine et je cherche à la mettre en lumière. Si les gens sont touchés par cette beauté à travers mon travail, ce sera formidable !
Peindre, c’est une belle manière de témoigner de la beauté de la vie.
Pour en savoir plus sur le travail de Sandrine :
Le projet OVDB (On Veut Du Beau) : www.ovdb.fr
Le lien vers la page de la galerie Saint Simon :
facebook/Galerie-Saint-Simon-Versailles
Exposition Galerie Saint Simon, 10 rue Saint Simon à Versailles, du lundi 13 au dimanche 19 novembre 2017, de 10h30 à 12h30 et de 15h à 20h.
3 commentaires
Très bel article et très belles photos.
Merci beaucoup pour votre commentaire! Si vous souhaitez être tenue au courant des prochains articles, je vous invite à suivre la page Facebook @lalleedesrendezvous. A bientôt sur le blog!
Très bel article et photos.